Depuis 30 ans, l’évolution de la France métropolitaine peut se traduire par un constat majeur. L’évaluation de la dynamique de construction dans les pôles urbains débouche sur un résultat sans appel : une tendance à la stabilité globale, à définition géographique constante, depuis 1975. Cette constatation peut être faite, soit sur un échantillon regroupant les communes les plus denses, soit sur l’ensemble des communes déclarées urbaines en 1936, ou sur les centres des pôles urbains.
En conséquence seul l’étalement urbain, avec la transformation régulière de communes rurales en communes urbaines, explique l’augmentation de la population dite « urbaine ». Les condamnations rituelles, dans certains milieux, de l’étalement urbain n’ont donc aucun sens, sauf à vouloir condamner ce qui a permis à la majorité du pays de sortir de la crise du logement. Cela revient en fait à vouloir imposer le modèle intellectuel de la ville dense, qui correspond parfaitement aux goûts et aux activités de certains milieux, à toutes les autres catégories de populations, notamment ouvrières, sans distinction de leurs attentes et de besoins spécifiques.
En première approximation, depuis 30 ans, chaque année :
• 80 communes rurales sont devenues urbaines,
• 10 nouvelles unités urbaines sont apparues.
Les prévisions pour l’avenir
Cette tendance va se maintenir : la pression de la population dans les centres en faveur des espaces verts et de la protection des cœurs d’îlots ne fait que croître. C’est d’ailleurs une nécessité si les communes concernées veulent conserver des familles avec enfants, ou des personnes âgées pouvant sortir de chez elles.
De plus, ces dernières décennies, les villes centre ont toutes pu bénéficier du départ de certaines usines, comme de terrains militaires et de gares SNCF pour faire de grandes opérations urbaines. Mais ce filon est en cours d’épuisement.
Dans ces conditions, une densification physique des pôles urbains existants au rythme de 1% par an, déjà difficile à tenir, permettra tout juste de maintenir la densité démographique. Et cela reste une hypothèse optimiste au vu des données actuelles. Comme ces pôles urbains contiennent environ 16 millions de résidences principales, cela correspond à une progression d’environ 170 000 logements par an.
On le voit bien par exemple sur la commune de Saintes ou l’explosion démographique et bien plus importante que le volume de construction. La ville s’étend, mais le nombre d’habitant augmente bien plus vite. Il devient difficile d’acheter une maison à Saintes sans passer par un professionnel de l’immobilier.
Les zones rurales et périurbaines
L’explosion périurbaine, amorcée depuis 1975, a des causes bien identifiées et d’abord la demande générale d’espace. Cela concerne l’habitat, avec une forte augmentation du nombre de m² par personne, mais aussi les emplois réclamant de l’espace : industriels ou logistiques. Chassés du centre des villes par les processus de densification, ou les problèmes d’environnement, ces emplois se mettent, soit en périphérie de villes – les entrées de ville et échangeurs sur les rocades-, soit carrément plus loin : les industries à la campagne.
Dans ce contexte, la distance moyenne des déplacements augmente, mais leur durée moyenne reste stable depuis 20 ans. Les espaces se spécialisent, avec une certaine dominance des employés en ville. A l’inverse, il existe une plus forte dominance des ouvriers dans le périurbain et dans le rural, pour accéder aux usines et aux emplois à l’extérieur des rocades, et qui sont toujours mal desservies en transports en commun.
Cette tendance lourde se maintient depuis 30 ans.
En effet :
• C’est d’abord une optimisation pour les ménages sur le plan micro-économique, car les coûts de construction et d’acquisition des logements sont moins chers qu’en zone urbaine. Il en va de même des coûts de gestion de par l’absence de charges de gestion locatives.
• C’est également une excellente solution pour les finances publiques : en effet, les pôles urbains ont du mal à maîtriser les coûts de congestion, en investissement comme en fonctionnement. Et ces coûts croissent avec la densité.
Alors on peut avancer que :
• La population des zones urbaines existantes dans les années à venir restera stable,
• Les zones à dominante rurale vont évoluer au rythme démographique du reste du pays,
• Les communes périurbaines devraient accueillir une part essentielle de l’effort national de construction.
Ce grand calage macro-économique et macro-géographique effectué laisse bien sûr ouvertes de grandes plages d’incertitudes concernant le type d’urbanisation et le type de construction qui seront utilisées. Pour cela, il faut rentrer dans des analyses plus précises en utilisant une méthode des scénarios, par exemple ceux réalisés par l’INRA dans le cadre de ses analyses sur le thème de « l’avenir des ruralités ».